Lonlonyin – Chapitre 3

ATTIRANCE

Ignorant les regards stupéfaits posés sur nous, je me levai brusquement et me tournai vers Oscar en lui demandant de prendre ma place. Garder l’honneur de mes parents, oui, mais ne surtout pas permettre à un gros porc de prendre ses aises avec moi. Ce n’était pas tant le jeu de séduction, mais le contexte qu’il l’entourait qui me dérangeait. J’avais clairement montré que mon intérêt se tournait plus vers son frère, ce qui ne l’a pas freiné. Le reste de la soirée fut accompagné d’une ambiance de gêne, Rodrigue n’osant plus affronter mon regard, ce qui ne me dérangea pas.

*

Je lâchai une dernière expiration en me mirant. La robe de couleur bleu foncé moulait discrètement mon corps, les manches mi-longues étaient un peu plus évasées, sauf aux épaules qui étaient découvertes. Je vérifiai une dernière fois mon maquillage avant de prendre la route, remerciant le ciel que mes parents ne soient pas là. Durant le trajet jusqu’à la salle privée dans laquelle se tiendrait la soirée, un poids pesait sur mon cœur. Cette situation demeurait nouvelle pour moi, et qu’importe mes motivations, le stress ne m’épargnait guerre. Quelques fois, j’avais rêvé de ressentir ces choses dont parlaient les gens : cette chaleur au cœur, les fameux papillons dans le ventre, l’envie de me donner entièrement à quelqu’un et de me redécouvrir à travers cette personne. Ces rêves duraient moins de deux secondes, avant que la réalité ne me rattrape. Finalement, je me rendais à l’évidence: l’amour ne m’aimait pas, et je ne désirais aucunement son attention. Alors, pourquoi ressentais-je autant de sentiments contradictoires en me rendant à ce fameux rendez-vous?

J’arrivai dans la petite salle dans laquelle quelques lumières multicolores illuminaient la pénombre. Mon rythme cardiaque s’accéléra soudainement. Pour éviter la crise de panique, je m’appuyai au comptoir du bar. Satanée anxiété! Les mots de Carly semblaient soudainement distants, mon souffle se faisant de plus en plus rare. Je sursautai lorsque quelqu’un me toucha le bras. Cela eut le don de me ramener à la réalité. Je me retrouvai nez à nez avec un homme de taille moyenne, cheveux dégradés dont la partie centrale était twistée, visage ovale, yeux que je devinai noirs malgré la faible intensité lumineuse. Je ne parvins pas à cerner les détails de son visage, mais son parfum me frappa de plein fouet. C’était une odeur sombre renvoyant toutefois une multitude de senteurs florales mêlées, avec un cœur de roses.

— Cette soirée rencontre vous stresse aussi, hein? m’engagea l’homme d’une voix assez éteinte.

Je me contentai de lui adresser un sourire gêné.

— Sènan?

Je reconnaissais cette voix. Je regardai par-dessus mon épaule pour découvrir Ismaël, sourire aux lèvres, et très beau, même sous un voile d’obscurité. Il me fit la bise en disant:

— C’est moi, Ismaël, ravi de te rencontrer, tu es encore plus belle en vrai.

Je lançai un dernier regard à mon précédent interlocuteur qui me sourit, avant de suivre Ismaël. Il plaça sa main dans le creux de mon dos, tout en me conduisant à une des tables.

— C’est très étrange de se retrouver ici, lui confessai-je, sentant l’odeur de son parfum très fort, m’agresser les narines.

— Je ne te le fais pas dire, c’est la première fois que j’assiste à une des soirées, me répondit-il en me tirant la chaise.

Nous nous installâmes. Pendant qu’un serveur prenait sa commande de boisson, je parcourrai la pièce du regard. L’homme de tout à l’heure discutait à présent avec un groupe de femmes, qui semblaient très intéressées par ses propos. Il laissait de légers sourires accompagner ses dires, chacun de ses mouvements en était très fluide, presque comme s’il se livrait à une danse. Mon attention dévia sur les autres personnes présentes: certains semblaient avoir trouvé la perle rare, d’autres donnaient l’impression qu’ils préféraient être ailleurs qu’avec la personne les accompagnants. Je passai ensuite ma commande: un cocktail à l’hibiscus. Ismaël me considéra durant un instant avant de reprendre la conversation :

— As-tu discuté avec d’autres hommes sur la plateforme?

Je retins un froncement de sourcils.

—Oui, mais ce n’était pas très concluant, avouai-je en glissant mes doigts sur la table.

Un single de la chanteuse Zeynab ornait le fond de la soirée, rendant l’atmosphère idéale pour former des couples.

— Pareil pour moi, avec les femmes! Tu as l’air différente, ajouta-t-il à travers un souffle.

— Ne le sommes-nous pas toutes? répliqué-je avec un rictus séducteur.

Il plaça sa main sur la mienne, la chaleur émanant d’elle se dispersant à travers mon épiderme. Le serveur apporta nos breuvages, en acceptant nos remerciements.

—Que recherches-tu chez un homme? me questionna-t-il en retirant sa main pour boire son cocktail.

Rien.

— Élégant, avec un sens de l’humour, une attache pour la famille, ambitieux, énumérai-je en me mettant dans la peau de ma mère.

L’Homme en face de moi m’attirait certes physiquement, mais sa personnalité ne me correspondait pas. D’ailleurs, je n’étais pas certaine du type d’homme qui m’irait, et c’était peut-être la raison pour laquelle j’avais abandonné ce combat. Il esquissa un sourire satisfait, sûr de remplir ces critères. Lorsque les premières notes de la chanson Mon bébé de Petit Miguelito prirent place, Ismaël se leva et m’entraîna avec lui. Il guida les pas de danse, que je tentai de suivre sans savoir exactement où je mettais les pieds. Il glissa sa main dans le bas de mon dos, me rapprocha de lui pour m’entraîner dans une valse déconcertante. Il me tentait de l’embrasser, car la chaleur émanant de sa peau perçait la mienne. Je me contentai de cette danse, laissant l’homme me glisser quelques compliments à l’oreille, titillant le plaisir de la femme en moi.

Aurait-il été aussi attiré par moi, s’il savait pour mes seins ? M’aurait-il trouvé autant féminine qu’il le chantait, ou perdrait-il ses moyens? Je m’interrogeai, supportant la bile acide qui m’irritait la gorge. Tu es belle, Sènan. Aucun homme ne doit te faire oublier ça, me convaincs-je intérieurement.

—Tout va bien?

Quand la voix roque d’Ismaël parvient à mes oreilles, je m’aperçus de mon état. Mes doigts crispés serraient étroitement ses épaules, je ne respirais pratiquement plus, comme prise dans une sorte de paralysie. Je revins brusquement à la réalité, me tançant intérieurement d’avoir laisser le stress me dominer à plusieurs reprises lors d’une soirée que j’étais supposée diriger. Mon compagnon me conduisit à notre table, manifestement inquiet. Pour le rassurer, je touchai délicatement son avant-bras, petit sourire au coin des lèvres.

— Est-ce que tu veux qu’on poursuive la soirée ailleurs? lui proposé-je, la malice habillant mon visage.

Il haussa les sourcils, confus, avant que ses traits ne s’éclairent de nouveau quand il comprit ma proposition. Bien qu’elle ait mal démarré, je me promis qu’après cette soirée, il ne pourrait plus se passer de moi.

Chapitre 1

Chapitre 2 (I)

Chapitre 2( II)

Chapitre 3

Chapitre 4

Chapitre 5

Chapitre 6

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

%d blogueurs aiment cette page :